INFECTIONS CONGÉNITALES À CYTOMÉGALOVIRUS
L’équipe de l’unité PACT (Prise en charge de anomalies congénitales et leur traitement) au sein de l’hôpital Necker Enfants Malades avec le Centre National de Référence (CNR) virologique sur le CMV, présente la plus grande expertise multidisciplinaire sur ce sujet et relève tous les défis posées par cette infection avant la naissance.
Nous avons développé une expertise particulière dans l’évaluation du risque d’infection fœtale chez les femmes présentant une première infection en début de grossesse.
Le premier volet de l’étude CYMEPEDIA a permis de préciser la prévalence et la sociologie de l’infection congénitale à CMV à la naissance en Ile-de-France, soit 0,37% des naissances.
- Notre laboratoire a développé une expertise particulière dans l’isolement du virus dans un simple écouvillon salivaire ou sur une goutte de sang séchée sur un buvard
- La moitié de ces infections sont la conséquence de la transmission d’ une première infection de la femme enceinte
- L’autre moitié survient chez les enfants de femmes déjà immunisées
- La gravité est la même dans ces deux populations d’enfants puisque XX% ont des symptômes à la naissance de même nature dans les deux cas.
- La typologie des populations exposées est bien définie : Pour les primo-infections, il s’agit de femmes jeunes d’un environnement socio-économique favorisé dont la contamination se fait par leur premier enfant en âge pré-scolaire, en particulier en crèche. Les infections non-primaires touches des femmes jeunes qui sont souvent issues de l’immigration sont exposées à travers une communauté d’enfants, leur niveau socio-économique est souvent bas et le chômage plus fréquent.
Le deuxième volet de l’étude CYMEPEDIA qui permet d’observer le devenir des enfants infectés a d’ores et déjà permis d’affirmer que la période critique de l’infection maternelle pour le risque du développement de l’enfant était le premier trimestre de la grossesse.
L’étude CYMEVAL a permis de préciser le pronostic et les risques d’anomalies du développement en fonction des symptômes présentés in utero par les fœtus infectés. Les principaux déterminants en sont le terme à l’infection maternelle, les signes échographiques, la quantité de virus circulant dans le sang fœtal et le retentissement sur la production des plaquettes s-du sang fœtal.
L’étude CYMEVAL a montré qu’il était possible de diminuer les symptômes de l’infection à la naissance des fœtus infectés symptomatiques en administrant un traitement antiviral à la femme enceinte
Les défis que nous souhaitons relever sont bien définis et les moyens nécessaires pour y parvenir sont connus et chiffrés.
1/ Il n’existe aujourd’hui aucun moyen de faire le diagnostic d’une infection non primaire à CMV chez une femme enceinte.
La sérologie (IgG, IgM, avidité des IgG si IgM positives) permet le diagnostic de primo-infection pendant la grossesse. Il n’y a pas de méthode validée pour diagnostiquer une infection maternelle secondaire. Le diagnostic de l’infection fœtale se fait par PCR dans le liquide amniotique et est indiqué en cas de symptômes fœtaux évocateurs ou de primo-infection maternelle. Lors d’une infection le virus persiste dans les urines jusqu’à 250 jours et 4% des femmes enceintes déjà immunisées ont du virus dans leur urines au 1er trimestre.
Nous souhaitons étudier la possibilité d’une infection secondaire chez 2000 femmes immunisées avant la grossesse et en recueillir le devenir. Ce diagnostic sera fait par une amplification du génome viral par PCR dans les urines de ces femmes au premier trimestre.
Coût de l’étude : 130 000 euros sur 18 mois
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2/ La part individuelle génétique de la susceptibilité à développer une infection congénitale grave est très vraisemblable mais inconnue à ce jour
De nombreuses études de différents groupes, dont le nôtre, n’ont pas permis de retrouver un lien entre le génotype de la souche, défini par la séquence de certains gènes codant pour des protéines jouant un rôle important dans la physiopathologie de l’infection, et la sévérité de l’infection congénitale. Nous allons tester rétrospectivement le génome de fœtus et de nouveau-nés infectés par le cmv en fonction de la gravité des lésions développées.
Pour ce faire une étude de l’exome sera réalisée dans 20 cas présentant des séquelles sévères et comparé à 20 cas ne présentant pas de séquelle selon la définition de l’étude. Nous étudierons également les gènes de l’immunité dans l’ensemble des individus de la cohorte quel que soit le statut clinique : absence de séquelle, séquelle minimes, séquelles modérées ou séquelles sévères.
Coût de l’étude : 15 000 euros
ÉTUDE FINANCEE EN COURS
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3/ Une thérapie prénatale efficace pour les fœtus infectés à haut risque de lésions cérébrales est nécessaire
Le pronostic de l’infection fœtale peut être établi lors d’une imagerie fœtale (échographie (US) / IRM) combinée à des tests de laboratoire (1). Le pronostic est mauvais pour les lésions cérébrales sévères et bon avec des paramètres d’imagerie et de laboratoire normaux. Dans l’intervalle, les fœtus symptomatiques présentant des caractéristiques cérébrales extra-cérébrales ou bénignes constituent une cible appropriée pour le traitement antiviral afin de prévenir le développement de lésions cérébrales irréversibles.
Le valaciclovir (VACV), bien toléré pendant la grossesse, a été administré à des femmes portant un fœtus présentant au moins un signe échographique d’infection qui a conduit 79% des nouveau-nés traités à naître asymptomatiques par rapport à 43% après l’histoire naturelle de la maladie.
Seuls 57% des fœtus avec plus de 1 symptôme prénatal sont nés asymptomatiques, ce qui suggère une baisse de l’efficacité du VACV dans de tels cas. De plus, bien que la charge virale du sang fœtal ait diminué avec le traitement, 90% des fœtus traités présentaient toujours un ADN du CMV détectable dans le sang de cordon à la naissance.
Le letermovir (LET, disponible en 2018) a une nouvelle activité anti-CMV spécifique et, dans les études de toxicité préclinique, a été bien toléré, non génotoxique ni tératogène et n’a pas altéré la fertilité à la dose recommandée chez l’humain (5). En outre, aucune préoccupation spécifique ne découle de son profil de sécurité chez l’homme (5). Il contrôle l’infection à CMV et la maladie chez les patients ayant subi une greffe de moelle osseuse en réalisant une clairance de la charge virale dans 50 à 80% des cas (3,4). Nous émettons l’hypothèse que le traitement maternel avec LET inhibera la réplication du CMV fœtal mieux que le VACV chez les fœtus infectés symptomatiques et conduira à une proportion plus élevée de PCR CMV négative à la naissance dans le sang de cordon ombilical.
Nous proposons de comparer le VACV au léterrmovir dans un essai randomisé
Coût de l’étude : 500 000 euros
DEMANDE DE FINANCEMENT EN COURS AU PHRC 2018
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4/ Il n’existe pas de prévention efficace de la transmission materno-fœtale lors d’une primo-infection maternelle au premier trimestre de la grossesse.
Le dépistage universel de la primo-infection maternelle et celui de l’infection néonatale ne sont pas recommandés à ce jour principalement en raison de l’absence de prévention efficace de la transmission du virus au fœtus. Il n’y a pas de prophylaxie de l’infection congénitale à CMV: pas de vaccin, résultats contradictoires sur les mesures d’hygiène et sur les globulines hyperimmunes pour éviter la transmission verticale. L’inhibition précoce de la réplication virale par un traitement antiviral chez les femmes infectées en début de grossesse devrait limiter le taux de transmission materno-fœtale. Ce taux est en moyenne de 35% et nous faisons l’hypothèse qu’un traitement par Letermovir dès le diagnostic d’infection maternelle et pendant 8 semaines pourrait réduire la fréquence des infections fœtales vérifiée par amniocentèse de 50%.
Coût de l’étude : 250 000 euros
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5/ Étude du passage transplacentaire du Letermovir et du Maribavir sur modèle de cotylédon placentaire perfusé
Nous avons montré que ces nouveaux antiviraux particulièrement efficaces sur le CMV et peu toxiques présentaient tous les 2 un passage transplacentaire aboutissant à une concentration efficace dans le compartiment foetal
Coût de l’étude : 7 000 euros
ÉTUDE FINANCÉE ET RÉALISÉE
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ÉTUDES MENÉES PAR PACT SUR L’INFECTION CONGENITALE À CMV :
CYMEVAL (Financement PHRC 2012-2016): Traitement par le valaciclovir des foetus infectés et symptomatiques in utero
CYMEPEDIA (Financement PHRC 2012-2020) : Epidémiologie de l’infection congénitale en Ile-de-France et pronostic à 2 ans des enfants infectés
CYMEAUDIT (Financement PHRC 2012-2018) : Faisabilité du dépistage simultané de la surdité et de l’infection congénitale à CMV dans les premiers jours de vie.
BIOCMV (Financement CNR Herpes-Virus) : Banque de données déclarée à la CNIL, de liquide amniotique et de sérums de paires mère-enfant dans l’infection à CMV
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BIBLIOGRAPHIE PACT SUR L’INFECTION CONGENITALE A CMV
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